L’allaitement est le moyen utilisé par tous les mammifères pour nourrir leurs petits, depuis la naissance jusqu’au sevrage. Chaque espèce a un nombre de tétons qui correspond au nombre de petits en général, de deux pour la vache, la jument ou la femme et jusqu’à douze pour une truie. Le lait est différent pour chaque espèce et adapté au bébé.
Le lait maternel
Le lait maternel est sans conteste l’aliment le plus adapté à un nouveau-né, que ce soit par ses composants ou par sa constante évolution pour s’adapter au bébé en croissance.
Le lait maternel contient différents composants :
– de l’eau
– des protéines, qui ont un rôle nutritionnel mais sont aussi des facteurs de transport pour les vitamines, servent à la constitution des hormones et des enzymes
– des lipides, qui représentent la source la plus importante de calories dans le lait humain. Ils sont une importante source d’énergie mais jouent aussi un rôle majeur dans la constitution des membranes et tissus nerveux.
– du lactose
– des vitamines : A, D, K, E, C, du groupe B
– des oligo-éléments : calcium, magnésium, phosphore, fer, cuivre, zinc, manganèse, sélénium
La biodisponibilité de ces éléments est très bonne puisqu’elle est adaptée au nouveau-né. Il est plus difficile de dire si les mêmes éléments présents dans le lait maternisé sont aussi bien assimilés, car la forme moléculaire de ces composants, leurs interactions, peut les rendre moins assimilables par l’organisme.
Le lait maternel n’est pas seulement une source de nutriments, il contient aussi de nombreux facteurs destinés à protéger l’enfant. En effet le système immunitaire du nourrisson est immature, et le lait maternel apporte des facteurs protecteurs mais favorise aussi la mise en place d’un système immunitaire efficace.
Dans le lait maternel sont présents :
– toutes les classes d’immunoglobuline, avec une prédominance de l’IgA, qui protègent l’enfant de tous les germes présents dans son environnement habituel.
– la lactoferrine, qui fixe le fer et le rend indisponible pour les germes pathogènes qui en ont besoin pour proliférer, est bactéricide et antivirale, ainqi qu’anti-inflammatoire.
– la caséine, qui favorise fortement la croissance du Bifidobacterium bifidum, bactérie dite probiotique qui peut venir en aide aux bactéries naturellement présentes dans notre organisme, et aider à rééquilibrer la flore intestinale. Elle limite aussi la prolifération de germes pathogènes.
– les oligosaccharides et glycoconjugués inhibent l’adhésion des bactéries, virus et toxines sur leurs cellules cibles
– des cytokines, qui sont des immunomodulateurs et sont faiblement produites par le nourrisson.
Le lait maternel contient aussi des éléments vivants : des cellules (lymphocytes, PNN, macrophages, qui compensent l’immaturité du système immunitaire du nouveau-né) et des bactéries (lactobacilles, streptocoques, staphylocoques, entérocoques).
Et puis le lait maternel évolue dans le temps! On parle de colostrum pendant les premiers jours, puis de lait mature.
Le colostrum a des propriétés assez proches du liquide amniotique, le système digestif s’y accomode donc bien. Il a aussi des propriétés laxatives, ce qui facilite l’expulsion du méconium. Il contient beaucoup de cellules et facteurs stimulant le système immunitaire.
Le lait mature arrive suite à la montée de lait, stimulée par la succion du bébé.
Le lait évolue aussi au cours d’une même tétée : très riche en eau au début, utile si bébé a juste besoin d’hydratatation, il devient bien plus gras et nutritif en fin de tétée.
Il me paraît important de parler du lait maternel, et de toutes ses qualités, mais aussi de l’allaitement en soi. Car il paraît évident, lorsqu’on sait que le lait maternel est la meilleure chose à donner à son enfant, que toutes les mères souhaitent cela pour leur bébé, mais c’est oublier que l’allaitement s’il est naturel n’est pas forcément facile.
L’allaitement
L’allaitement est l’action d’allaiter, de nourrir de son lait, que ce soit en donnant le sein ou en utilisant un biberon, un verre… C’est la norme biologique de notre espèce, car nous appartenons aux mammifères qui sont dotés de glandes mammaires permettant la production du lait pour nourrir le nouveau-né.
Une vache, une jument, une chatte, ne se posent pas la question de savoir si elles vont allaiter ou non leur petit, c’est le seul moyen pour nourrir les tout-petits et assurer leur survie jusqu’à ce qu’ils soient capables de s’alimenter autrement. Par contre quand ils arrivent à s’alimenter suffisamment par ailleurs elles peuvent aussi induire le sevrage, il faut savoir que les dents des petits chiots et chatons poussent tôt et les mères peuvent à un moment leur montrer que l’allaitement est terminé!
Pour les femmes, depuis qu’il existe des nourrices puis du lait maternisé, allaiter n’est plus forcément une question de survie, il y a des alternatives. Du coup la question se pose de vouloir allaiter ou non, et même de sa capacité à allaiter ou non car les femmes des générations précédentes se sont parfois entendu dire qu’elles n’avaient pas assez de lait ou qu’il n’était pas assez nutritif.
Si la question se pose, c’est aussi parce que nos mères n’ont pas forcément allaité et ne sont donc pas à même de nous transmettre leur expérience, de savoir comment nous soutenir. On se retrouve parfois démunie, sans savoir où trouver les informations et le soutien pour que cela se passe au mieux. Les sage-femmes, les consultantes en lactation, des associations de soutien à l’allaitement, la Leche League sont des ressources possibles pour être accompagnée. Il est possible de les consulter dès le prénatal.
Et puis aujourd’hui il n’est pas si facile d’allaiter : le regard de la société est encore plutôt négatif, la reprise du travail se fait dès 10 semaines après la naissance et on peut ne pas avoir envie d’allaiter pour devoir induire un sevrage si tôt, et puis l’allaitement peut être présenté comme une entrave à la liberté de la femme, comme si allaiter l’obligeait à ne jamais s’éloigner de son bébé. Parfois il est question aussi de la place de l’autre parent, du fait que l’exclusivité de l’allaitement limite l’espace pour l’autre.
Bien sûr l’allaitement est naturel, mais il présente aussi ses difficultés : mise au sein difficile pour bébé, douleurs, crevasses, mycoses, mastites peuvent arriver pour maman. Ce n’est pas toujours le cas, mais mieux vaut être bien entourée pour pouvoir réagir en cas de problème. Avoir une liste de professionnels que l’on peut appeler en cas de besoin peut vraiment aider.
L’allaitement est aussi parfois rendu responsable de la fatigue de la nouvelle mère, du fait qu’elle a du mal à retrouver son énergie après l’enfantement, ou bien des changements de l’aspect des seins alors que ceux-ci sont présents même sans allaitement, les bouleversements hormonaux de la grossesse ayant un impact sur les tissus.
Allaiter, ce n’est pas juste donner du lait maternel à son bébé, c’est aussi donner de son temps, continuer à partager son corps après la grossesse, une grande dépense calorique, la pression que l’on peut se mettre pour la prise de poids du bébé. Et il est clair que chaque femme devrait pouvoir faire le choix d’allaiter ou non son enfant, sans pression ni jugement, qu’elle puisse sentir si c’est juste pour elle ou non, si elle se sent bien avec ça. Et qu’elle puisse le remettre en question chaque jour de l’allaitement si elle sent que ça ne convient plus. Parce que faire au mieux pour son bébé c’est bien, mais l’essentiel est que la maman soit à l’aise avec ses choix, qu’elle se sente libre de commencer un allaitement ou non, et de l’interrompre quand elle n’y trouve plus son compte. L’allaitement a deux protagonistes, la mère et l’enfant, et chacun des deux doit être bien dans cette situation. Si ce n’est plus le cas, la mère ou l’enfant peut choisir de mettre fin à l’aventure.
Il ne faut pas oublier qu’au delà des aspects nutritionnels de l’allaitement, via le lait, il y a a aussi de nombreux besoins auxquels l’allaitement répond mais qui peuvent être remplis aussi en donnant un biberon si on a conscience de ces besoins du nouveau-né : proximité et réponse rapide aux besoins crée un sentiment de sécurité chez lui, peau à peau qui apporte chaleur et stimulation des cinq sens, production d’ocytocine qui est l’hormone de l’attachement pour tous les membres de la famille, sécrétée lors de la tétée et qui passe dans le lait mais aussi lorsqu’on sent son nourrisson, qu’on l’a contre soi… Connaître ces besoins permet aussi au partenaire de les remplir via le portage, le peau à peau, les soins…
Alors, comment choisir si l’on allaite ou pas son nouveau-né?
Les bienfaits de l’allaitement, et comment le favoriser
Le sujet des bienfaits du lait maternel ont été abordés au début de cet article. Mais qu’en est-il des bienfaits de l’allaitement en lui-même?
Pour le bébé, il y a toute la sphère nutritionnelle du lait, et puis la proximité qu’induit l’allaitement au sein, l’arrivée d’ocytocine et d’endorphines dans le lait. Des études ont montré qu’il y a des avantages à court terme : les diarrhées, les affections respiratoires basses aiguës, les otites, le RGO sont moins fréquents chez les enfants allaités. L’allaitement est aussi un facteur de diminution d’arrivée de mort inattendue du nourrisson.
D’autres avantages existent à long terme : diminution des allergies et de l’asthme, prévention de l’obésité, moins de diabète (type I ou II), moins d’hypertension, de maladie coeliaque ou inflammatoire de l’intestin. Un allaitement de plus de 6 mois est souvent nécessaire pour que ces avantages à long terme soient visibles.
Des avantages sont aussi présents pour la mère : moins d’anémie du post-partum car meilleures contractions de l’utérus quand l’ocytocine est sécrétée pour la tétée, facteur préventif des cancers du sein et des ovaires, moins de diabète de type II. Le fait d’allaiter exclusivement permet aussi de reculer la reprise de la fertilité et d’éviter une grossesse rapprochée non désirée.
L’allaitement permet d’avoir toujours à disposition un aliment pour son bébé, que ce soit lors d’une sortie, d’un rendez-vous médical ou autre. Le lait est toujours à la bonne température, en quantité et qualité adaptées au bébé. Et allaiter ne veut pas dire être toujours près de son bébé, on peut aussi quand l’allaitement est mis en place tirer son lait.
Pour le postnatal immédiat, il est conseillé de rester un maximum couchée puis semi-assise, et le fait d’allaiter permet de ne pas avoir à se lever, on peut d’ailleurs allaiter couchée. Les hormones sécrétées lors de l’allaitement favorisent aussi l’endormissement après la tétée et un sommeil plus réparateur pour la mère.
L’allaitement commence par le fait que la mère soit bien nourrie, par les aliments et boissons mais aussi par le repos, le respect de ses besoins, qu’on prenne soin d’elle. C’est important d’avoir du soutien autour pour que l’allaitement puisse bien se dérouler.
On peut favoriser le bon déroulement d’un allaitement pour la mère et le bébé en se renseignant dès la grossesse pour connaître ce qui facilite ou complique un allaitement, pour avoir des personnes ressources en cas de besoin, et pour se sentir en confiance sur ses propres capacités à allaiter. Il est aussi important que le partenaire soit présent et soutenant, notamment en nourrissant la mère mais aussi avec des paroles d’encouragement si elle doute, des câlins si elle en a besoin, du soutien si elle reçoit des injonctions ou critiques.
Allaiter n’est pas mieux, c’est normal, c’est-à-dire que c’est la norme pour les humains. Il présente de nombreux bénéfices, que ce soit dans les sphères nutritionnelles, physiques ou émotionnelles, pour la famille au complet. Mais nourrir son bébé ne se fait pas obligatoirement par ce biais, et si l’aliment est un lait maternisé on peut aussi remplir tous ses besoins affectifs en étant conscients de leur existence. Allaiter devrait être un moment agréable pour la mère, qu’elle se sente bien, pour pouvoir prendre soin de son bébé.